Cet article a été originellement publié dans l’édition de La Tribune de l’Art du 2 mars 2024
C’est une ambassadrice idéale qui vient accueillir les nombreux visiteurs de cette passionnante exposition pour laquelle il faut souligner l’intelligente et fructueuse collaboration entre les deux institutions régionales que sont la Cité du Vitrail de Troyes, dont nous avions déjà écrit (voir l’article) combien la programmation se voyait attendue avec impatience compte tenu de la – relative – déception ressentie en découvrant son parcours permanent, associée au BAL – Musée des Beaux-Arts de Limoges qui a su envoyer L’Émaillerie limousine pour illustrer les débuts d’un grand nom du vitrail du XXe siècle, hélas trop peu connu du grand public.
Il fallait bien une aussi riche rétrospective en deux temps pour bien saisir la longue carrière de Francis Chigot, qui embrassa d’abord une esthétique Art nouveau qui est mise en verre à l’aide des matériaux les plus modernes, comme les verres chenillés dont le relief traduit à merveille le pli d’une étoffe ou le mouvement de l’eau, loin des si sages baies vitrées fleuries prisées des commanditaires privés comme des travaux de restauration exécutés à partir de 1916 dans plus de dix-sept cathédrales et des dizaines d’églises. Fervent catholique, Francis Chigot fut en effet aussi actif dans les édifices religieux que civils, même si le parcours n’ose pas le blasphème et sépare fort chastement les casinos et les églises.
On ne peut que saluer le formidable travail conjoint des héritiers de l’artiste comme de l’atelier, qui existe toujours et a d’ailleurs largement participé à cette exposition en restaurant de nombreuses pièces, sans parler des historiens de l’art qui ont su valoriser une personnalité majeure et pourtant méconnue du vitrail au XXe siècle, un stimulant axe de recherche pour la Cité du Vitrail qui renoue avec le meilleur de sa mission initiée voici quelques années, lorsqu’on avait pu redécouvrir le maitre verrier troyen Louis Germain Vincent-Larcher (voir l’article) mais qui se poursuivra bientôt puisqu’une autre prometteuse exposition est déjà annoncée autour des vitraux commandés pour la cathédrale Notre-Dame de Paris dans les années 1930 !