Quelques mois après l’inscription des villes d’eaux européennes au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, l’article de Martine Tandeau de Marsac paru en janvier 2022 dans la revue de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Vichy et des Environs (1), plonge le lecteur dans la fastueuse époque des cures thermales et de la dynamique architecturale et décorative qui l’a accompagnée.
Avec "Les décors des lieux de cure thermale : Exemple des vitraux de Francis Chigot à Vichy de 1911 à 1941" on découvre années après années le travail patient et déterminé, marchand et inspiré, mais aussi créatif et collectif du maitre-verrier. (2)
Grâce aux extraits d’archives – les « petits carnets de Francis Chigot » – partagés avec une exacte générosité, l’auteur retrace à la fois l’intimité succulente des voyages d’affaires de l’artiste et le contexte historique de commande et de réalisation d’un ensemble de vitraux considérable (3).
Maquette couleur par P. Parot, pour vitraux F. Chigot, Petit Casino (Centre Valery-Larbaud), 1928. AD87, 29F137. Ph. Asso F C
Une plongée dans les coulisses des commandes et des productions artistiques
On pénètre alors dans les coulisses de la production des 100m2 de verrières du Grand Casino commandés par la Compagnie Fermière de l’Établissement thermal de Vichy en 1911, des partenariats avec les architectes Percilly et Brière notamment pour les décors de dizaines d’hôtels, des baies de la chapelle Saint-Luc de l’église Saint-Blaise ou encore des maquettes petit casino, aujourd’hui Centre culturel Valéry Larbaud.
Plafond « Art déco » en verres blancs imprimés. Grand Casino de Vichy, vers 1920. Ph. Asso. F C.
L'adaptation à un environnement thermal où la lumière doit entrer à profusion pour mieux soigner
Pour ce faire, on apprend non seulement que le miroitier Chaussegros est un relais essentiel de Francis Chigot sur place, mais aussi qu’il aura fallu 1070 heures aux deux dessinateurs Carlus et Pierre Parot et neufs ouvriers monteurs, coupeurs, calibreurs, poseurs, pour la livraison en mars 1928 des baies et plafond vitré de l’Hôtel de Ville à partir, très probablement, des maquettes d’Henri Barberis originaire de Moulins.
Un art du verre révélé à toute heure, attendu et reconnu par la ville et ses critiques :
C’est qu’en tant que lauréat du concours lancé par la mairie de Vichy l’année précédente, il fallait exceller : « La fortune de Vichy vient de ses eaux et cette vérité doit se manifester à la place d’honneur de la maison commune ».
Vitrail de la grande baie de l’escalier de l’Hôtel de Ville de Vichy, 1928
Art d’une stylisation ferme et élégante décrite ainsi :
Créée en 1937, cette société savante a pour but de favoriser la recherche dans les domaines de l’histoire, l’archéologie, l’art et le patrimoine de Vichy et des régions avoisinantes. https://shavichy.com/index.htm
comportant les actes du 76ème congrès de la Fédération des Sociétés Savantes du Centre de la France qui s'est déroulé à Vichy à l'automne 2021. Plus d'information
1911-1912 : 11 plafonds vitrés pour le Grand Casino de Vichy.
1911-1914 : Magasins Bellam-Mathias : plafonds vitrés et enseigne.
1913-1914 : Casino des Fleurs : plafonds salle de Baccara, salle du fond, salle de jeux, plafond cintré et bordure iris ; Hôtel Alexandra ; restaurations diverses Grand Casino.
1914 : Vingt-quatre panneaux à l’hôtel des Ambassadeurs. Trois plafonds à l’hôtel de l’Amirauté : maquettes des décorateurs Barberis.
1914-1916 : verres avec émaux pour l’Hôtel du Parc, M. Aletti.
1919 : Le Royal Hôtel.
1920-1921 : Banque de France et restauration de panneaux en 1924. Enseigne pour magasin « Bon Marché » ; plafond pour restaurant des Sources.
1923 : Grand Bazar de la Ménagère. Hôtel Lutétia : bordure plafond SM et 2 baies plein cintre.
1925 : Vitraux pour l’hôtel Midland, l’hôtel du Louvre, l’hôtel Albert 1er.
1926 : Appareil lumineux pour le pavillon des bouteilles. Enseignes ovales BALLUTAUD.
1926-1932 : Vitraux de la Chapelle Notre-Dame des Malades ou Saint-Luc en l’église Saint-Blaise de Vichy.
1927 : Hôtel France-Pasteur, Hôtel de Genève.
1927-1928 : Hôtel de ville avec dessins des frères Barberis.
1928-1929 : Notre Dame de Lourdes ou église Jeanne d’Arc.
Déc. 1928-1929 : Petit Casino : diverses verrières pour le théâtre et salle de jeux.
1930 : Hôtel des Célestins.
1931 : Comptoir d’Escompte.
1941 : Vichy Hôtel Lutetia (restauration).
Et tous ceux que l’on a pu oublier, en particulier ceux de demeures privées…
1996 et après : Restauration des verrières du Grand Casino de Vichy par l’Atelier du Vitrail, ainsi que les vitraux de l’Hôtel de ville et du Petit Casino.